Interaction entre les rayonnements ionisants et la matière
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A. Les particules chargées.

I. Les particules chargées légères: les électrons (négatons - positons) 
   1. L'ionisation et l'excitation 
   2. Le rayonnement de freinage 
   3. Cas particulier des positons

II. Les particules chargées lourdes: les particules α

III. Le transfert linéique d'énergie: T.L.E.

IV. Trajectoire et parcours des particules chargées dans la matière
   1. Les particules β-
   2. Les particules α
   3. Conclusion sur le parcours des particules chargées

B. Les rayonnements électromagnétiques X et γ

I. Les 3 effets principaux
   1. L'effet photoélectrique
   2. L'effet ou diffusion Compton
   3. La production de paires
   4. Domaine de prépondérance de chacun de ces effets

II. Atténuation des rayonnements électromagnétiques
   1. Loi d'atténuation
   2. Couche de demi-atténuation
   3. Tableau résumé

 

A. Les particules chargées.

I. Les particules chargées légères: les électrons (négatons ou positons)

Ces électrons :

proviennent des émissions β-, β+ de noyaux radioactifs sont issus de l'ionisation ou l'excitation des noyaux cibles
sont des électrons mis en mouvement par un accélérateur de particules sont issus de l'interaction de photons X ou γ avec la matière

1. L'ionisation et l'excitation

Les électrons interagissent de manière prépondérante avec les électrons des atomes constituant le milieu traversé.

Si l'énergie transférée par l'électron incident est supérieure à l'énergie de liaison (E > 30 eV) d'un électron de l'atome cible, celui-ci est expulsé du cortège et il y a ionisation de l'atome. Les électrons atomiques concernés sont les électrons fortement liés de la couche K.

Si l'énergie transférée par l'électron incident est exactement égale à la différence entre les énergies de liaison de 2 couches électroniques de l'atome cible, un électron de cet atome saute sur une couche moins liée et il y a excitation. Les électrons atomiques concernés sont les électrons faiblement liés des couches externes.

Les ionisations et les excitations sont à l'origine des lésions biologiques radioinduites.

2. Le rayonnement de freinage

Plus rarement les électrons interagissent avec les noyaux des atomes constituant le milieu traversé.

L'électron incident est dévié dans le champs coulombien de l'atome cible et ce changement de trajectoire s'accompagne de l'émission d'un rayonnement X appelé rayonnement de freinage. Ce phénomène ne concerne que les électrons de très fortes énergies (plusieurs MeV) et qui de plus traversent un milieu constitué d'atomes lourds, c'est-à-dire un milieu dense.

Exemple: pour un radionucleide n'émettant que des β- comme le 3215P (Eβ-Max = 1,7 MeV), il faut prohiber des écrans de plomb pour s'en protéger.

En effet, le plomb étant extrèmement dense, on augmente le rayonnement de freinage. Il faut au contraire utiliser un matériau léger comme le plexiglass.

3. Cas particulier des positons

Quand le positon incident est au repos, c'est-à-dire quand il a perdu la totalité de son énergie initiale, il s'associe à un négaton et ces 2 particules se dématérialisent. C'est ce que l'on appelle l'annihilation.

Cependant, les lois de la conservation de l'énergie montrent qu'il résulte de ce phénomène d'annihilation 2 rayonnements gamma (2 photons γ) émis dans des directions oppsées et chacun d'une énergie de 511 keV.

Démonstration :

L'énergie équivalente à la masse au repos de l'électron est: Eélectron = m . c2
La masse de l'électron = 0,9 10-27 g = 0,9 10-30 kg et c = 3 108 m.s-1
donc : Eélectron = 8,1 10-14 J  =   511 keV  (puisque : 1 eV = 1,6 10-19 J)

Comme un électron d'origine est un négaton et l'autre un positon on a émission de 2 rayonnements d'énergie 511 keV.

On trouve dans certains livres que l'annihilation ne donne naissance qu'à un seul photon gamma.

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II. Les particules chargées lourdes : les particules α

Elles interagissent principalement avec les électrons des atomes cibles, engendrant une ionisation ou une excitation (les électrons mis en mouvement sont appelés rayons δ).

Les interactions avec les noyaux sont secondaires.

Les particules α ont une masse 4 x 1800 fois plus importante que celle des électrons. En conséquence, étant beaucoup plus lourdes, elles ne sont pas sujettes au rayonnement de freinage. 

III. Le transfert linéique d'énergie (T.L.E.)

Quel que soit le mécanisme d'interaction entre les électrons incidents et la matière, il y a un transfert d'énergie de l'électron à la matière et l'électron est ralenti. L'expérience montre que les faibles transferts d'énergie sont trés favorisés. L'électron incident doit donc subir un trés grand nombre d'interactions avant d'être stoppé.

Ce ralentissement progressif et continu est caractérisé par une grandeur qui s'appelle le transfert linéique d'énergie ou T.L.E. : T.L.E. = dE / dx

qui traduit l'énergie moyenne transférée au milieu par la particule (dE) par unité de longueur de la trajectoire parcourue (notion développée avec celle de parcours).

Cette définition indique que plus le T.L.E. est grand, plus une grande quantité d'énergie est cédée sur une petite distance (ou épaisseur de tissus).

Dans les tissus biologiques, les dégâts sont d'autant plus importants que l'énergie cédée localement par la particule incidente est grande.

Le T.L.E. reflète donc directement la nuisance biologique d'un rayonnement donné.

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IV. Trajectoire et parcours des particules chargées dans la matière

1. Les particules β-

La trajectoire d'un électron dans un milieu donné peut être trés sinueuse, puisque les électrons peuvent subir des déviations de 180° dans le cas de la rétrodiffusion. En conséquence, la profondeur maximale atteinte par un électron dans la direction incidente initiale est inférieure à la longueur de sa trajectoire.

Cette profondeur maximale est ce que l'on appelle le parcours (ou profondeur de pénétration ou portée). Le parcours d'un électron dans un milieu donné est fonction de son énergie et ce parcours peut être estimé par la relation empirique suivante :

Parcours = 0,412 . En / r          avec : n = 1,265 - 0,0954 . Ln(E)

Le parcours s'exprime en cm, E en MeV et r en g.cm-3.

Ainsi les particules β- émises par le 3215P d'énergie (Eβ-Max = 1,7 MeV) ont un parcours dans l'air et dans l'eau de :

  air eau
n 1,214
r (g.cm-3) 1,3 10-3 1
parcours (cm) 603 0,8

2. Les particules α

Les processus de ralentissement des particules α sont identiques à ceux des particules β. Cependant, leur charge électrique et leur masse sont plus élevées. En conséquence, les particules αont une trajectoire presque rectiligne et trés courte.

Ainsi, on peut considérer que la longueur de leur trajectoire et leur parcours sont identiques.

Elles sont arrétées par quelques centimètres d'air ou une feuille de papier.

Par ailleurs, les particules α ont une énergie courante élevée (quelques MeV) et puisqu'elles ont un parcours trés court, elles sont caractérisées par un T.L.E. beaucoup plus élevé que celui des particules β(entre 200 et 500 fois plus élevées).

Exemple : le parcours dans l'eau d'une particule α dont l'énergie est 5,3 MeV et le T.L.E. dans l'eau est de 130 keV.µm-1 est :

dx  =  dE / T.L.E.  =  5300 keV / 130 keV.µM-1  =  40 µm.

3. Parcours des particules chargées

La densité des tissus mous peut être considérée comme équivalente à celle de l'eau (soit d ≈ 1). C'est la raison pour laquelle la valeur du parcours des particules chargées dans l'eau est importante.

Par ailleurs, l'épaisseur de la couche cornée de la peau est ≈ 70 µm.

Qu'en-est-il de l'exposition de l'organisme humain à un rayonnement ionisant en considérant la peau comme première barrière ?  

  particules β (E = 1,7 MeV) particules α (E = 5,3 MeV)
parcours dans l'air  603 cm  5 cm 
parcours dans l'eau  0,8 cm = 8000 µm 40 µm 
TLE moyen  0,4 keV.µm-1 130 keV.µm-1
contamination externe  dangereuse  "moins dangereuse" 

a. les particules β

Leur pouvoir de pénétration des dans les tissus est relativement faible. De plus, la profondeur à laquelle la dose maximale est délivrée par ces particules est inférieure au parcours dans l'eau et ce en raison de leur trajectoire courbe.

Exemple : une particule βd'énergie de 1 MeV a un parcours dans l'eau de 0,4 cm soit 4000 µm, mais la dose est délivrée à une profondeur de 0,17 cm soit 1700 µm.

Il n'en reste pas moins que ces valeurs sont très largement supérieures à l'épaisseur du derme (70 µm) et donc une contamination externe par les particules βest dangereuse. De plus, au delà de la notion de parcours, ces particules engendrent des rayonnements X de freinage en quantités non négligeables.

Remarque : les notions de dose et de contamination sont développées dans le cours "Protection contre les rayonnements ionisants".

b. les particules α

La valeur de leur parcours dans l'eau est inférieure à 70 µm. Donc les particules α ne font pas courir de risque lors d'une exposition externe.

Par contre, lors d'une exposition interne (c'est-à-dire au sein de l'organisme) elles sont trés dangereuses en raison de leur T.L.E. extrèmement élevé.

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B. Les rayonnements électromagnétiques X et γ

I. Les 3 effets principaux

1. L'effet photoélectrique

Un photon d'énergie incidente EI qui interagit avec un électron d'un atome cible peut éjecter cet électron de son orbite en lui communiquant une énergie cinétique, EC :  EC = EI - EL

où EL est l'énergie de liaison de l'électron éjecté sur son orbite.

Effet photoelectrique Radioprotection Interaction rayonnement ionisant matiere biochimej

Source : "Manuel pratique de radioprotection" Gambini & Granier (1997) - ed. TEC & DOC Lavoisier

Si l'énergie du photon incident est inférieure à l'énergie de liaison de l'électron K, l'effet photoélectrique se fait avec un électron de la couche L, etc...

a. Le photoélectron mis en mouvement perd son énergie par phénomène d'ionisation du milieu, comme on l'a vu lors du premier cours: ces ionisations sont à l'origine des radiolésions.

b. La seconde conséquence d'une interaction par effet photoélectrique est la réorganisation du cortège électronique pour combler la lacune sur la couche dont a été expulsé l'électron.

Il en résulte essentiellement l'émission d'un autre électron d'une couche encore plus périphérique que l'on appelle un électron Auger.

2. L'effet ou diffusion Compton

Le photon incident interagit encore une fois avec un électron, mais cet électron a une énergie de liaison beaucoup plus faible que celui impliqué dans l'effet photoélectrique.

Effet Compton Radioprotection Interaction rayonnement ionisant matiere biochimej

Source : "Manuel pratique de radioprotection" Gambini & Granier (1997) - ed. TEC & DOC Lavoisier

La diffusion Compton concerne donc des électrons moins liés, voire libres.

L'électron cible est expulsé dans une direction donnée: c'est l'électron Compton. Le photon incident est quant à lui, diffusé dans une direction qui fait un ceratin angle avec la direction de l'électron Compton.

Lorsque l'énergie du photon incident croît, l'énergie emportée par l'électron Compton devient de plus en plus importante par rapport à celle du photon diffusé.

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3. La production de paires

Le champs électrique intense qui entoure un noyau peut transformer un photon en négaton et positon: c'est l'effet de production de paires.

Production paire Radioprotection Interaction rayonnement ionisant matiere biochimej

Source : "Manuel pratique de radioprotection" Gambini & Granier (1997) - ed. TEC & DOC Lavoisier

Cette matérialisation (qui est le processus inverse de l'annihilation) nécessite une énergie minimale du photon incident d'au moins 2 fois 511 keV, soit Emin = 1,02 MeV.

Le négaton et le positon créés perdent leur énergie par phénomène d'ionisation du milieu (comme vu précédemment).

Enfin, le positon s'annihile avec un électron négatif du milieu et il en résulte un rayonnement de 2 photons gamma d'énergie individuelle 511 keV à 180° l'un de l'autre (comme vu précédemment).

4. Domaine de prépondérance de chacun de ces effets

La probabilité d'interaction par effet Compton est à peu prés indépendante du numéro atomique de la cible. En revanche, celles par effet photoélectrique et production de paires lui sont proportionnelles.

Donc le domaine d'énergie dans lequel l'effet Compton est dominant est d'autant plus important que le numéro atomique de la cible est plus faible.

Domaine preponderance effet rayonnement electromagnetique X gamma biochimej

Ainsi, dans les applications usuelles des rayons X et des radionucléides émetteurs γ (dont les énergies se situent entre 50 keV et quelques MeV) l'effet Compton est prédominant.

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II. Atténuation des rayonnements électromagnétiques

Au contraire des particules chargées qui cèdent progressivement leur énergie à la matière, les rayonnements électromagnétiques disparaissent brutalement à la suite d'une interaction. On ne peut plus parler de ralentissement. Il faut introduire la notion d'atténuation en nombre.

1. Loi d'atténuation

Dans le cas d'un faisceau monochromatique parallèle de rayons X ou γ, le nombre de rayons émergeant (N) n'ayant subit aucune interaction dans la traversée d'un écran d'épaisseur X est lié au nombre de rayons incidents (N0) par la relation :

N = N0 . e-µX

µ est le coefficient linéique global d'atténuation dont l'unité est cm-1; µ dépend de l'énergie des photons incidents et de la nature du matériau.

Puisque les photons considérés sont monochromatiques, une relation tout à fait analogue relie l'énergie incidente (EI) du faisceau et son énergie après avoir traversé une épaisseur X (EX) :

EX = EI . e-µX

2. Couche de demi-atténuation

On appelle couche de demi-atténuation (CDA) ou épaisseur moitié (X1/2), l'épaisseur de matériau nécessaire pour atténuer d'un facteur 2 le nombre initial de photons (ou bien leur énergie initiale).

On a la relation : CDA = X1/2 = Ln2 / µ

Cette relation souligne l'analogie entre la loi de décroissance radioactive des noyaux et l'atténuation d'un faisceau de photons.

Le tableau suivant donne quelques valeurs d'épaisseur moitié dont l'unité est cm :  


E (MeV)  Eau (d = 1)  Tissus humains (d ≈ 1) Verre (d = 2,7)  Plomb (d = 10,8) 
0,1  4,1  4,2  1,5  0,12 
10  10  0,94 
14  14  1,4 

3. Tableau résumé

Rayonnements directement ionisants
particules chargées: α, électrons β- et β+

Matière en interaction

Rayonnements INdirectement ionisants
rayonnements électromagnétiques : X, γ

Ionisation Électrons couche K Effet photoélectrique
Excitation  Électrons peu liés  Effet Compton
Rayonnement de freinage  Noyau  Effet de matérialisation de paires 
Arrêt (transfert linéique d'énergie)    Atténuation en nombre

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