Réactions d'oxydo-réduction - Relation de Nernst - NAD(P)+

Chaîne respiratoire - Théorie chimio-osmotique - Synthèse d'ATP

1. Réactions d'oxydo-réduction et potentiel de réduction standard

a. Définitions : réducteur - oxydant - réaction et couple redox
b. Le potentiel de réduction standard

2. Potentiel de réduction de 2 demi-réactions redox : Relation de Nernst

3. Relation [potentiel de réduction standard - énergie libre de Gibbs standard]

4. Structure du NAD+ et du NADP+ - mécanisme de transfert de l'ion hydrure

5. Rôles biologiques des formes réduites NADH et NADPH

6. La chaîne respiratoire

a. Généralités sur la respiration cellulaire aérobie
b. La mitochondrie et la chaîne respiratoire

 
c. Les protéines de la chaîne respiratoire
d. Mécanisme du transfert des électrons
e. Les systèmes de navette
f. Bilan - résumé de la chaîne de transport d'électrons

7. La synthèse d'ATP par phosphorylation oxydative et l'ATP synthase

a. Théorie chimio-osmotique et force proton-motrice
b. Formalisme de la force proton-motrice
c. Le complexe V ou l'ATP synthase
d. Le mécanisme de la synthèse de l'ATP par l'ATP synthase

8. Cours sur la respiration chez les végétaux

9. Quelques inhibiteurs et agents découplants de la respiration

10. Liens Internet et références bibliographiques

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1. Réactions d'oxydo-réduction et potentiel de réduction standard.

a. Définitions : réducteur - oxydant - réaction et couple redox. 

De nombreuses réactions du métabolisme mettent en jeu des transferts d'électrons et bien souvent de protons. Une même molécule va donc être dans un état réduit ou oxydé et ces deux formes de la même molécule s'appelle un couple oxydo-réducteur ou couple rédox.

Considérons une molécule A : par convention, les deux formes oxydée et réduite de A s'écrivent : (Aox / Ared).
Exemples : (NAD+ / NADH); (FAD / FADH2); (cytb(Fe3+) / cytb(Fe2+)); (2H+ / H2); (1/2 O2 / H2O)

La réaction d'oxydo-réduction ou réaction redox entre ces deux formes s'écrit : αA Aox + n e- <=> βA Ared

  • Aox = forme oxydée de A
  • Ared = forme réduite de A
  • n = nombre d'électrons captés par Aox
  • la molécule qui perd des électrons est oxydée et s'appelle le réducteur
  • la molécule qui accepte des électrons est réduite et s'appelle l'oxydant
  • un couple redox est caractérisé par un potentiel de réduction standard
b. Le potentiel de réduction standard

On mesure un potentiel de réduction standard à l'aide d'une pile électrochimique constituée de 2 demi-piles. Chaque demi pile est un couple redox, siège d'une réaction rédox.

Quand on mesure le potentiel rédox standard d'un couple rédox, l'une de ces demi-piles sert de référence pour la mesure (de la même manière que la mesure de l'énergie libre de Gibbs nécessite que l'on ait fixé des conditions de référence).

Cette demi-pile de référence est l'électrode à hydrogène (qui est le siège de l'oxydation de l'hydrogène) :

  • la demi-pile de référence contient de l'hydrogène gazeux (H2) à une pression de 1 atmosphère
  • une solution de H+ à une concentration de 1 M donc à un pH = 0
  • le potentiel de réduction du couple redox (2H+/H2) est le potentiel de réduction standard : . Il est fixé arbitrairement à 0 V

Cependant, pour les réactions biologiques, les conditions standard se rapportent à une concentration d'ions H+ de 10-7 M (pH = 7) dans la demi pile de référence.

Ainsi, pour les réactions biologiques, on définit un potentiel de réduction standard dans les conditions physiologiques : E°'.
Exemples : E°' (NAD+ / NADH) = - 0,32 V; E°' (2H+ / H2) = - 0,42 V; E°' (1/2 O2 / H2O) = + 0,84 V

Voir le calcul de la valeur de E°'(2H+/H2).

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2. Potentiel de réduction de 2 demi-réactions redox : Relation de Walther Hermann Nernst

Lorsque les électrodes d'une pile sont réunies par un conducteur extérieur au système, un courant électrique traverse spontanément la pile et parcourt l'ensemble du circuit.

a. La réaction d'oxydation qui se produit à l'anode où se trouve le couple oxydo-réducteur (Box / Bred) s'écrit :

αB Bred <=> βB Box + n e-

  • Bred = forme réduite de B
  • Box = forme oxydée de B
  • n = nombre d'électrons cédés par Bred 
  • le potentiel rédox standard de ce couple est E°'B 

b. La réaction de réduction qui se produit à la cathode où se trouve le couple oxydo-réducteur (Aox / Ared) s'écrit :

αA Aox + n e- <=> βA Ared

  • Aox = forme oxydée de A
  • Ared = forme réduite de A
  • n = nombre d'électrons captés par Aox 
  • le potentiel rédox standard de ce couple est E°'A

c. La réaction électrochimique totale dans la pile est la somme des 2 demi-réactions rédox et s'écrit :

αA Aox + αB Bred <=> βA Ared + βB Box avec : E°'A > E°'B

Le potentiel de réduction de cette réaction globale, ΔE'réaction, est donné par la relation de Nernst :

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  • R = constante des gaz parfaits = 8,314 J.mol-1.K-1 = 1,987 cal.mol-1.K-1
  • T = température absolue = 273,3 °K + T°C
  • n = nombre d'électrons échangés (le plus souvent 2 en biochimie)
  • F = constante de Faraday = 96493,5 Coulombs.équivalent-1 = 23062 cal.V-1.équivalent-1 = 6,02 1023 charges électroniques
  • les termes : βB, ... sont les coefficients stoechiométriques élevés en puissance
  • attention : c'est le signe "moins" entre les deux termes

Voir une démonstration de l'équation de Nernst.

Exercices de calculs de potentiels rédox (et autres : thermodynamique, cinétique ...).

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3. Relation entre la différence de potentiel de réduction standard et la variation d'énergie libre de Gibbs standard

La différence de potentiel de réduction standard ΔE°' associée au transfert d'électrons d'un couple rédox est liée à la variation d'énergie libre de Gibbs standard par la relation :

ΔG°'réaction = -  n . F . ΔE°'réaction

  • n est le nombre d'électrons échangés lors de la réaction d'oxydo-réduction (pas la valence).
  • F est la constante de Faraday.

Voir des exercices d'application.

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4. Structure du NAD+ et du NADP+ - mécanisme de transfert de l'ion hydrure par les déshydrogénases

Dans un trés grand nombre de réactions d'oxydo-réduction qui ont lieu dans la cellule, les électrons sont transférés par des coenzymes : on peut citer à titre d'exemple, le nicotinamide adénine dinucléotide ou NAD+ et le nicotinamide adénine dinucléotide phosphate ou NADP+.

  • Ces deux coenzymes contiennent le nicotinamide qui est l'amide de l'acide nicotinique.
  • Ils contiennent une liaison phosphoanhydride qui relie deux nucléotides: l'adénosine monophosphate, qui provient de l'ATP, et le ribonucléotide de nicotinamide appelé nicotinamide mononucléotide.
  • Dans la structure du NADP+ et du NADPH, un groupe phosphoryle supplémentaire substitue l'hydrogène de l'hydroxyle situé en position 2' du ribose lié à l'adénine.
Lors de la réaction de réduction, le groupe nicotinamide de ces deux coenzymes capte un ion hydrure H- selon un mécanisme qui est un exemple remarquable de la très haute stéréospécificité des réactions catalysées par les enzymes.

Enfin, les spectres d'absorption des formes oxydée et réduite de ces deux coenzymes sont distincts.

Cette propriété est utilisée dans les dosages enzymatiques qui utilisent des déshydrogénases ("dehydrogenase" en anglais) dont un exemple de classification selon l'"Enzyme Commission" (E.C.) est :

E.C. 1.-.-.- : classe des oxydoréductases
E.C. 1.4.-.- : qui agissent sur le groupe donneur d'électrons CH-NH2
E.C. 1.4.1.- : et dont l'accepteur d'électrons est le coenzyme NAD+ ou NADP+
Exemple : E.C. 1.4.1.4 ou glutamate déshydrogénase à NADP+.

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5. Rôles biologiques des formes réduites NADH et NADPH

Malgré des structures très semblables, les formes réduites de ces deux coenzymes sont employées dans la cellule de manière très différente.

Le NADH est produit par des réactions de voies du catabolisme (dégradation) :

  • Puis il est réoxydé en NAD+ dans des conditions aérobies avec production concomitante d'ATP : c'est la phosphorylation oxydative.
  • Le NADH représente donc une source énergétique préalable à l'ATP.

Le NADPH est produit par des réactions de voies de l'anabolisme (biosynthèse) telles que la voie des pentoses phosphate.

  • Le NADPH constitue un pouvoir réducteur : il fournit des électrons aux voies métaboliques de biosynthèse réductrices (exemples : biosynthèse d'acides gras, biosynthèse d'acides aminés, biosynthèse des nucléotides). 
  • La cytochrome P450 réductase est une enzyme liée à la membrane du réticulum endoplasmique qui transfère les électrons du NADPH au cytochrome P450 et à d'autres protéines à hème (exemples : hème oxygénase ou cytochrome B5) : NADPH -> FAD -> FMN -> P450 -> O2

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6. La chaîne respiratoire

a. Généralités sur la respiration cellulaire aérobie

De manière schématique, les réactions du catabolisme ont deux finalités :

  • Fournir des molécules, notamment des squelettes carbonés, aux voies de biosynthèse.
  • Fournir des coenzymes réduits : NADH et FADH2 qui sont à l'origine de la synthèse d'ATP via la chaîne respiratoire et l'ATP syntase.

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La respiration cellulaire correspond donc aux processus suivants :

  • Dans une cellule Eucaryote, la glycolyse a lieu dans le cytoplasme. Le pouvoir réducteur porté par le NADH formé lors de la glycolyse est transféré dans la mitochondrie par des systèmes protéiques de transport ou navette.
  • Le cycle de Krebs produit du NADH et du FADH2. Comme le cycle de Krebs a lieu dans la mitochondrie, le pouvoir réducteur porté pas ces deux molécules se trouve immédiatement en place pour être pris en charge par la chaîne respiratoire qui se situe dans la mitochondrie.
  • La chaîne respiratoire convertit le pouvoir réducteur des coenzymes réduits en une forme d'énergie qui alimente la phosphorylation oxydative qui produit la plus grande partie de l'ATP de la cellule via l'ATP synthase.

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Source : "Biologie"Campbell (1995) Ed. De Boeck Université

Chez les plantes un processus analogue a lieu dans les chloroplastes. Un processus très semblable se déroule chez les bactéries.

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b. La mitochondrie et la chaîne respiratoire

La mitochondrie est limitée par deux membranes caractérisées par des propriétés très différentes :

La membrane externe est pauvre en protéines. Elle contient, en particulier, des protéines transmembranaires, les porines, qui permettent le passage des ions et des métabolites hydrosolubles de masse molaire < 7000 Daltons.

A l'inverse, la membrane interne est très riche en protéines mais elle est quasiment imperméable aux ions et aux métabolites hydrosolubles. Ces substances ne peuvent traverser la membrane qu'à l'aide de protéines membranaires de transport (l'ATP, l'ADP et le Pi sont transportés par ce type de protéines), ou de systèmes plus complexes qu'on appelle navette.

L'espace entre ces deux membranes s'appelle l'espace intermembranaire.

La zone interne de la mitochondrie (bordée par la membrane interne) s'appelle la matrice. Elle contient les enzymes du cycle de Krebs et la plupart de celles qui catalysent l'oxydation des acides gras.

La chaîne respiratoire est localisée dans la membrane interne des mitochondries. Le nombre des crêtes accroit la surface de cette membrane et ainsi chaque mitochondrie contient des milliers d'exemplaires de la chaîne de transport d'électrons. Les crêtes pénètrent dans la matrice.

Certaines protéines mitochondriales sont synthétisées par la mitochondrie (génome mitochondrial), mais la plupart d'entre elles sont codées par le génome nucléaire puis importées dans la mitochondrie.

Voir un cours sur la biogénèse (synthèse, adressage et assemblage) des protéines membranaires intégrales.

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c. Les protéines de la chaîne respiratoire

La chaîne respiratoire est un ensemble de complexes protéiques qui assurent un transfert de protons et/ou d'électrons comme le ferait "une équipe de rugby qui se passe le ballon".

Les caractéristiques des quatre complexes protéiques sont les suivants :

Complexe Protomères Masse molaire (Da) Composants
complexe I : NADH-coenzyme Q oxydoréductase

44 (mammifères)

> 800.000
  • 1 flavine adénine dinucléotide (FMN)
  • 22 à 24 atomes Fe - S dans8 centres (mammifères)
complexe II : succinate-coenzyme Q oxydoréductase 4 125.000
complexe III : coenzyme Q-cytochrome c oxydoréductase 8 220.000
complexe IV : cytochrome c oxydase 12 200.000
  • cytochrome a
  • cytochrome a3
  • 2 ions cuivre

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d. Mécanismes du transfert des électrons

Aperçu complet et très détaillé de l'ensemble des complexes de la chaîne respiratoire.

Le complexe I

C'est le complexe protéique constitué du plus grand nombre de sous-unités dont 7 sont codées par le génome mitochondrial. Lien vers la sous-unité 75 kDa.

Le (NADH + H+) cède ses électrons par paire (sous forme d'ion hydrure, H-) alors que le coenzyme Q (ou ubiquinone) les accepte un par un. Le complexe I catalyse la réduction de la FMN ou flavine mononucléotide par NADH selon les étapes suivantes :

          +H+, + H                  -H+ , - e                 -H+ , - e-
FMN -----------> FMNH2 ----------> FMNH. -----------> FMN

La FMN est donc une sorte de "convertisseur" d'un flux bi-électronique en un flux mono-électronique. Elle cède ses électrons à un ensemble de centres [Fe-S], accepteurs mono-électroniques, qui eux-mêmes les cèdent au coenzyme Q qui est réduit en passant par un intermédiaire semi-quinone :

     +e-              +2H+ , + e-
Q -----> Q.-  ------------> QH2

  • Le coenzyme Q est un transporteur mobile de la chaîne respiratoire.
  • Lors du déplacement des électrons au sein du complexe I, celui-ci fonctionne comme une pompe à protons qui expulse 3 ou 4 protons de la matrice vers l'espace intermembranaire, ce qui créé un gradient de concentration de protons.

Le complexe II

  • Le complexe II accepte deux électrons du succinate et catalyse la réduction du coenzyme Q en QH2, le succinate étant transformé en fumarate (c'est l'une des réactions du cycle de Krebs)
  • la réaction met en jeu le FAD, des centres Fe - S et un cytochrome b560 attaché au complexe II
  • la variation d'énergie libre de la réaction est faible du fait d'une faible différence de potentiel de réduction entre les donneurs et les accepteurs d'électrons.
  • en conséquence, le complexe II ne contribue pas à l'expulsion de protons.
Cependant, le complexe II joue un rôle capital puisque c'est par lui qu'entrent les électrons :
  • Du FADH2 issu du cycle de Krebs
  • portés par le NADH formé lors de la glycolyse puis transférés sous forme de FADH2 dans la mitochondrie par des systèmes de navette.

Le complexe III

  • Il est constitué entre autre d'une protéine Fe - S, d'un cytochrome b qui porte les groupes hème b560 et b566 et du cytochrome c1
  • les électrons sont cédés par le complexe III au cytochrome c (attention : différent du cytochrome c1) qui les amène au complexe IV
  • le tracé des électrons n'a été résolu que quand un trajet circulaire, appelé cycle Q, fût suggéré par Peter Mitchell puis détaillé entre autres par Bernard Trumpower
  • le coenzyme Q et le coenzyme QH2 diffusent d'une face à l'autre de la membrane mitochondriale interne et l'ensemble des deux hèmes du cytochrome b occupe toute l'épaisseur de cette membrane
  • la variation d'énergie libre liée au parcours des électrons au sein du complexe III est légrement plus faible que celle générée par le complexe I
  • cependant, 2 x 2 protons sont expulsés vers l'espace intermembranaire, le complexe III contribue à la formation du gradient de concentration de protons.

Le complexe IV

  • Le complexe IV est le dernier de la chaîne de transport d'électrons : il catalyse la réduction de l'oxygène moléculaire (O2) en eau (H2O).
  • quand les électrons traversent les cytochromes a et a3, les atomes de fer et de cuivre des hèmes changent d'état d'oxydation
  • le complexe IV contribue à la formation du gradient de concentration de protons en expulsant 2 protons vers l'espace intermembranaire et, du fait de la formation de molécules d'eau, en soustrayant des protons de la matrice.

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e. Les systèmes de navette ("shuttle")

Au cours de la glycolyse, 2 molécules de NAD réduit (NADH) sont formées par molécule de glucose dégradé.

  • En aérobiose, la réoxydation des coenzymes réduits se fait dans la mitochondrie via la chaîne respiratoire.
  • Or la membrane mitochondriale est imperméable aux coenzymes pyridiniques.
  • L'entrée du pouvoir réducteur (2 H+ + 2 e-) dans la mitochondrie se fait par 2 systèmes de transport appelés navette.

La navette glycérol phosphate

Elle met en jeu 2 enzymes :

Le pouvoir réducteur entre dans la mitochondrie de la manière suivante :

  • Celui-ci est d'abord transféré à la dihydroxyacétone phosphate (DHAP, intermédiaire de la glycolyse) pour former le glycérol 3-phosphate.
  • Ce dernier est reconverti en DHAP par le complexe G3PDH membranaire qui transfère le pouvoir réducteur au FAD pour former FADH2.
  • Enfin le pouvoir réducteur est transféré à un élément mobile (Q) qui le transfère à la chaîne de transport d'électrons au niveau du complexe III.
En conséquence, il n'y a que 2 molécules d'ATP qui sont synthétisées lors de la réoxydation du NADH formé au cours de la glycolyse quand le pouvoir réducteur entre dans la mitochondrie via la navette glycérol phosphate.

La navette malate - aspartate

Elle met en jeu de nombreuses enzymes et transporteurs membranaires : en particulier, la malate déshydrogénase (MDH1 et MDH2 - E.C. 1.1.1.37) et l'aspartate transaminase (GOT1 et GOT2, E.C. 2.6.1.1), présentes à la fois dans le cytosol et dans la mitochondrie.

Les principales étapes du mécanisme sophistiqué par lequel le pouvoir réducteur du NADH entre dans la mitochondrie sont les suivantes :

  • Le pouvoir réducteur est transféré au malate par MDH1 dans le cytoplasme : oxaloacétate + NADH <=> malate + NAD+.
  • Le malate entre dans la mitochondrie via un antiport [malate-α-cétoglutarate] (transport membranaire).
  • Le malate est converti en oxaloacétate par MDH2 et le pouvoir réducteur est transféré au NAD+ mitochondrial.
    • Le NADH formé est pris en charge par la chaîne de transport d'électrons.
    • L'oxaloacétate est converti en aspartate par l'aspartate aminotransferase.
  • L'aspartate retourne vers le cytosol via un antiport [glutamate-aspartate].
En conséquence, 3 molécules d'ATP sont synthétisées lors de la réoxydation du NADH formé au cours de la glycolyse quand le pouvoir réducteur entre dans la mitochondrie via la navette malate - aspartate.

Remarque : chez les organismes anaérobies (ou au cours de la fermentation), il n'y a pas de chaîne respiratoire (ou elle n'est pas employée). La réoxydation du NADH formé au cours de la glycolyse se fait via la conversion du pyruvate en lactate ou en éthanol.

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f. Bilan - résumé de la chaîne de transport d'électrons

L'enchaînement des réactions d'oxydo-réduction qui ont lieu lors du transfert des électrons de la chaîne respiratoire est résumé dans la figure ci-dessous.

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L'énergie libre de Gibbs étant une grandeur d'état thermodynamique, on peut ne considèrer que les réactions impliquant le premier donneur de protons et d'électrons (NADH) et le dernier accepteur d'électrons (l'oxygène moléculaire, O2).

Les deux demi-réaction rédox qui, du point de vue énergétique, résument la chaîne respiratoire sont :

(1)   NADH + H+ -> NAD+ + 2H+ +2 e- E°'(NAD+/ NADH) = - 0,32 V
(2)  1/2 O2 + 2H+ +2 e- -> H2O E°'(1/2 O2 / H2O) = + 0,82 V
Réaction : NADH + H+ + 1/2 O2 -> NAD+ + H2O E°'(1/2 O2 / H2O) - E°'(NAD+/ NADH) = + 1,14 V

D'après la relation qui lie la différence de potentiel de réduction standard, ΔE°'réaction, à la variation d'énergie libre de Gibbs standard, ΔG°'réaction :

ΔG°'réaction = - n . F . ΔE°'réaction = - (2 . 96500 . 1,14) ≈ - 220 kJ.mol-1

Puisque la variation d'énergie libre standard de la synthèse de l'ATP est environ +30,5 kJ.mol-1 , la variation d'énergie libre standard liée à la réoxydation du NADH devrait permettre, en théorie, la synthèse de [220 kJ.mol-1 / 30,5 kJ.mol-1] = 7 molécules d'ATP par molécule de NADH réoxydé.

Or ce sont 3 molécules d'ATP qui sont synthétisées.

  • En effet, le réel potentiel énergétique pour la synthèse d'ATP émane de la force proton motrice.
  • Par ailleurs, c'est le retour des protons vers la matrice qui est le moteur de la machinerie de synthèse de l'ATP.
  • Or il faut 3 protons pour synthétiser 1 molécule d'ATP et 9 à 10 protons ont été expulsés par paire d'électrons issus du (NADH).

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7. La synthèse d'ATP par phosphorylation oxydative et l'ATP synthase

a. Théorie chimio-osmotique et force proton-motrice

La théorie chimio-osmotique formulée par Peter Mitchell en 1961 (Prix Nobel en 1978) postule que le gradient de concentration de protons crée à travers la membrane sert de réservoir d'énergie libre de Gibbs pour la synthèse d'ATP.

En d'autres termes, au fur et à mesure que les électrons traversent les quatre complexes de la chaîne de transport d'électrons, des protons passent de la matrice à l'espace intermembranaire et générent un gradient de concentration de protons qui constitue ce réservoir d'énergie libre.

En effet, quand ces protons repassent la membrane interne en traversant une protéine membranaire intrinsèque, l'ATP synthase, cette énergie libre est libérée et utilisée par l'ATP synthase pour synthétiser l'ATP.

En conséquence, la matrice devient :

  • plus alcaline : différence de pH puisque pH = - log ([H+])
  • plus négative : diminution de charges + puisque diminution du nombre de protons

que l'espace intermembranaire.

La théorie chimiosmotique implique donc que la membrane interne est imperméable aux protons, sinon le gradient se dissiperait au fur et à mesure.

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b. Formalisme de la force proton-motrice

La composante chimique dépend de la différence de pH (ΔpH) entre les deux compartiments :

ΔG'chimique = 2,303 . n . RT . (pHint - pHext) = 2,303 . n . RT . ΔpH

La composante électrique est proportionnelle au potentiel de membrane mitochondrial (ΔΨm) qui traduit la différence de potentiel entre les deux faces de la membrane interne :

ΔG'électrique = n . F . ΔΨm

Par convention, le signe de ΔΨm est positif quand un ion est transporté du compartiment négatif (la matrice) vers le compartiment positif (l'espace intermembranaire).

La variation d'énergie libre de Gibbs globale est donc :

ΔG'globale = (n . F . ΔΨm) + (2,303 . n . RT . ΔpH)

En divisant les 2 termes de l'égalité par (n . F), on obtient une équation exprimée en volts :

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A 37°C, la valeur de chaque terme est :

  • Dans les conditions physiologiques : Δp = ± 0,20 à 0,25 V. La valeur positive indique le passage de protons de l'espace intermembranaire vers la matrice.
  • ΔpH = (pHespace intermembranaire -  pHmatrice) = - 1,4 unités pH
  • ΔΨm = (Ψespace intermembranaire  -  Ψmatrice) = 0,14 V 
  • ΔG'globale = + 21,8 kJ.mol-1 par proton expulsé
  • Remarque : certaines sources indiquent les valeurs : ΔpH = - 1 unité pH et ΔΨm = 0,15 V ou 0,16 V

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c. Le complexe V ou ATP synthase

Le complexe V, appelé ATP synthase F0F1 (nom officiel : H+-transporting two-sector ATPase, E.C. 7.1.2.2), utilise le gradient de concentration de protons comme source d'énergie pour synthétiser l'ATP :

  • le sigle "F" désigne un facteur de couplage, selon la nomenclature des enzymes : en effet, l'ATP synthase couple la phosphorylation de l'ADP en ATP à l'oxydation de substrats par la mitochondrie.
  • les ATP synthases sont des protéines oligomériques de masse molaire supérieure à 450 kDa et de structure très complexe : les types différents de chaînes polypeptidiques qui les composent sont au nombre de 8 chez E. coli, 8 ou 9 dans le chloroplaste, 10 ou plus dans la mitochondrie et au moins 13 pour celle du coeur de boeuf.
  • F1 est l'élément qui catalyse l'hydrolyse de l'ATP : on l'appelle usuellement l'ATPase F1 ou ATP hydrolase
  • le composant F1 de l'ATP synthase de E. coli a une stoechiométrie α3β3γδε (chaque lettre indiquant un type différent de sous-unité)
  • le composant F1 de l'ATP synthase de E. coli déborde dans le cytosol et celui de la mitochondrie déborde dans la matrice
  • F0 constitue un tunnel à protons sur toute l'épaisseur de la membrane interne de la mitochondrie
  • il a été baptisé ainsi du fait de sa sensibilité à l'oligomycine, antibiotique qui en se fixant à F0 empêche la synthèse d'ATP
  • le composant F0 de l'ATP synthase de E. coli a une stoechiométrie a1b2c10-12
  • la structure et la composition oligomérique du composant F0 de la mitochondrie est plus complexe que celui de E. coli

Attention : il ne faut pas confondre l'ATP synthase F0F1 et les ATPases de type "F" (ou F0F1-ATPase). Ces dernières sont des pompes ioniques ou ATPases ionophores : elle hydrolysent l'ATP. L'énergie qu'elles libèrent en hydrolysant l'ATP est utilisée pour le transport d'ions.

Il existe plusieurs autres types de pompes ioniques ATPases qui hydrolysent l'ATP.

  • ATPases de type "P" : ce sont des transporteurs de cations avec formation d'un intermédiaire phosphorylé à haut potentiel énergétique. Ce sont soit des monomères d'environ 100 kDa ou des oligomères. Elles transportent le calcium, les protons ou échangent le sodium et le potassium à travers la membrane plasmique des eucaryotes.
  • ATPases de type "V" : ce sont pompes à protons que l'on trouve dans les vacuoles, les lysosomes, l'appareil de Golgi .... Il n'y a pas de phosphorylation intermédiaire de l'enzyme. Elles sont constituées de deux types de chaînes polypeptidiques (A : 78 - 89 kDa et B : 60 - 65 kda) selon une organisation qui ressemble à celle des ATPases de type "F".

D'autres types d'ATPases :

  • de type "M" : transporteur de drogues
  • de type "H" : activité ATPase des protéines de choc thermique
  • de type "C" : impliquées dans les phénomènes de contraction (myosine)

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d. Le mécanisme de la synthèse de l'ATP par l'ATP synthase

La réaction peut s'écrire de la manière générale suivante :    n H+matrice + ADP + Pi -> n H+espace intermembranaire + ATP + H2O

  • Paul Boyer (Prix Nobel en 1997) a proposé un modèle pour le mécanisme enzymatique de la synthèse de l'ATP.
  • Ce modèle a été confirmé par l'élucidation de la structure tridimensionnelle de l'ATP synthase par John Walker (Prix Nobel en 1997).

Structure "rotor-stator / arbre à came" de l'ATP synthase F0F1

L'ATP synthase est ancrée dans la membrane par la sous-unité a de F0 : cette sous-unité constitue le "stator" (la partie fixe) de la "machinerie moléculaire rotative".

Les contraintes résultant de cet ancrage sont transmises aux sous-unités b et δ qui relient le complexe hexamérique [α3β3] du moteur F1.

Les pièces mobiles sont l'arbre γ central et la sous-unité c10-12 (en forme de disque) qui y est rigidement attachée et qui peut tourner par rapport à la sous-unité a (figure ci-dessous).

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source : Kulish et al. (2016)

respiration cellulaire phosphorylation oxydative transport electron energy free enthalpy Nernst potentiel redox potential chaine respiratoire force proton motrice catalytic mechanism ATP synthase biochimej

source : Wang & Oster (1998)

Description du mécanisme des sous-unités de F1

Le composant F1 de l'ATP synthase de E. coli a une stoechiométrie α3β3γδε (chaque lettre indiquant un type différent de sous-unité).

F1 est donc schématiquement un cylindre composé de sous-unités α et β altérnées et d'une sous-unité γ située au centre de ce cylindre.

  • Les 3 sous-unités β constituent 3 sites catalytiques portés par à l'interface avec les sous-unités α.
  • Les 3 sous-unités α constituent 3 sites non catalytiques.
  • Quand la sous-unité γ tourne, elle induit des changements de conformation des sous-unités β.
  • Les états conformationnels des sous-unités β sont appelés βO (ouvert - "open"), βL (relâché - "loose") et βT (à haute affinité - "tight").

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source : The Nobel Prize in Chemistry 1997

Le mécanisme est le suivant :

  • une molécule d'ATP déjà synthétisée est fixée à βT
  • βL fixe une molécule d'ADP et de Pi
  • le couplage entre la sous-unité γ et la sous-unité c de F0 permet à l'énergie apportée par la dissipation du gradient de concentration de protons de faire tourner la sous-unités γ
  • la sous-unité γ ayant tourné, βT change de conformation en βO et l'ATP déjà synthétisé est relargué
  • dans le même temps, βL change de conformation en βT et βO change de conformation en βL
  • le Pi réagit avec l'ADP pour former l'ATP au niveau de la sous-unité passée dans la conformation βT
  • le système est de nouveau dans la configuration générale de départ

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Source : Université de Leeds

Voir des compléments concernant le mécanisme de l'ATP synthase.

Considérons la molécule d'ATP qui est synthétisée au niveau de la sous-unité dans la conformation βT:

  • Cette molécule d'ATP se trouve dans un puits thermodynamique ce qui signifie que son énergie de fixation est tellement importante qu'elle ne peut-être relarguée tant que la sous-unité est dans la conformation βT.
  • La rotation de la sous-unité γ change la conformation des sous-unités β.
  • Ainsi le site à haute affinité pour l'ATP (Ks < 1 µM) devient un site à faible affinité (sous-unité dans la conformation βO) et l'ATP est relargué.

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9. Quelques inhibiteurs et agents découplants de la respiration

 

10. Liens Internet et références bibliographiques
"Principes de Biochimie" Horton, Moran, Ochs, Rawn et Scrimgeour (1994) - Ed. DeBoeck Universités - ISBN : 2-8041-1578-X

"ATP synthase web page"

Voir une liste de sites consacrés à l'ATP synthase

Voir une série d'animations et d'illustrations consacrés à l'ATP synthase

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Mitchell P. (1961) "Coupling of phosphorylation to electron and hydrogen transfer by a chemi-osmotic type of mechanism" Nature 191, 144 - 148.

Boyer et al. (1973) "A new concept for energy coupling in oxidative phosphorylation based on a molecular explanation of the oxygen exchange reactions" PNAS 70, 2837 - 2839

Abrahams et al. (1994) "Structure at 2.8 A resolution of F1-ATPase from bovine heart mitochondria" Nature 370, 621 - 628

Wang & Oster (1998) "Energy transduction in the F1 motor of ATP synthase" Nature 396, 279 - 282

Article

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Kulish et al. (2016) "F1 rotary motor of ATP synthase is driven by the torsionally-asymmetric drive shaft" Sci Rep. 6, 28180

Xiao et al. (2018) "NAD(H) and NADP(H) Redox Couples and Cellular Energy Metabolism" Antioxid. Redox Signal. 28, 251 - 272

Article

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