L'endosymbiose
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1. Evolution biologique des procaryotes aux eucaryotes : l'endosymbiose

2. Endosymbiose primaire et endosymbiose secondaire

3. Arguments supplémentaires pour une origine bactérienne du chloroplaste

 

4. Arguments supplémentaires pour une origine bactérienne de la mitochondrie

5. Evolution des organismes via la phylogènie du cytochrome C

6. Liens Internet et références bibliographiques

 

1. Evolution biologique des procaryotes aux eucaryotes : l'endosymbiose
Il existe deux grands types d'organismes

Les procaryotes (du grec, pro = avant et karyon = noyau) sont des êtres unicellulaires, dépourvus de noyau et bordés d'une membrane.

Les cellules des eucaryotes (eu, propre) sont généralement de plus grande taille, avec un noyau bordé d'une double membrane (ou enveloppe nucléaire).

Le plus souvent, elles contiennent aussi des membranes internes qui cloisonnent la cellule en y délimitant des organites qui ont des fonctions biologiques spécialisées.

  • Voir la comparaison procaryotes - eucaryotes.
  • Voir Edouard Chatton (1925)
  • Il y a 2 domaines chez les procaryotes : les bactéries et les archées (Archaea) - C.R. Woese et G.E. Fox. Ces 2 domaines sont aussi disctincts l'un de l'autre qu'ils le sont des eucaryotes.

Selon les éléments à la base de la théorie endosymbiotique [développée principalement par Max FJR Taylor (1979) et Lynn Margulis (1993)], les cellules eucaryotes proviennent de l'association de plusieurs procaryotes.

L'endosymbiose reprend des idées énoncées par le botaniste russe Konstantin Mereschkowski en 1905 (symbiogénèse).

"Serial Endosymbiosis Theory" - SET :

  • Taylor F.J. (1979) "Symbionticism revisited : a discussion of the evolutionary impact of intracellular symbioses" Proc. R. Soc. Lond. B. Biol. Sci. 204, 267 - 286
  • Margulis L. (1993) "Microbial Communities in the Archean and Proterozoic Eons" New York : W. H. Freeman & Co. Symbiosis in Cell Evolution

L'endosymbiose de l'origine de la cellule eucaryote postule que :

  • la mitochondrie dérive d'une bactérie ayant une "respiration" primitive au sulfate
  • le chloroplaste dérive des cyanobactéries (figure ci-dessous)

Endosymbiose endosymbiotic theory Lynn Margulis cyanobacterie cyanobacteria endocytose procaryote eucaryote chloroplast photosynthese photosynthesis oxygen respiration cytochrome mitochondrie mitochondria gene transfert evolution phylogenie phylogeny biochimej

Source : Futura-Sciences

L'endosymbiose est étayée par les faits suivants (liste non exhaustive) :

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Source : "The evolution of cell"

1. La taille des mitochondries et des chloroplastes est semblable à celle des bactéries (≈ 1 μm).

2. Chacun de ces organites possède une double membrane. La membrane externe dériverait de la cellule originale hôte.

3. La membrane externe des mitochondries et des chloroplastes et la membrane des bactéries contiennent des porines (protéines de transport). La cardiolipine est un lipide membranaire trouvé exclusivement dans la membrane interne des mitochondries et la membrane des bactéries.

4. Chacun de ces organites possède un ADN qui lui est propre (organites semi-autonomes). La comparaison des génomes indique que les cyanobactéries ont contribué à l'origine génétique des plastes.

5. Cet ADN est circulaire.

6. Chacun de ces organites possède le matériel nécessaire pour la synthèse protéique (ARNt, ribosomes, polymérases). La N-formylméthionine est utilisée comme acide aminé d'initiation de la traduction pour les protéines de ces organites comme pour les bactéries.

7. Chacun de ces organites peut se diviser par étranglement médian (après avoir dupliqué le matériel génétique). Ils sont en mouvement constant, ils fusionnent et forment un réseau dynamique.

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2. Endosymbiose primaire et endosymbiose secondaire

a. L'endosymbiose primaire

1. Il y a environ 1,5 - 2 milliards d'années, une cellule eucaryote primitive absorbe une α-protéobactérie* : la protéobactérie devient une mitochondrie qui assure une respiration "primitive" au sulfate. Il en résulte une cellule eucaryote hétérotrophe.

*α-protéobactérie : une bactérie Gram négatif (contenant une membrane externe), comme les espèces Rickettsia, qui est probablement la bactérie vivante la plus proche des mitochondries.

Il existe de nombreux modèles, parmis lesquels :

  • hypothèse classique : la complexité cellulaire des eucaryotes est apparue progressivement avant l'endosymbiose (par phagocytose) de l'α-protéobactérie qui est devenue la mitochondrie.
  • hypothèse de l'hydrogène : elle repose sur une symbiose métabolique entre des archées productrices de méthane et des α-protéobactéries. La complexité cellulaire des eucaryotes apparaît après l'endosymbiose. Martin & Muller (1998) "The hydrogen hypothesis for the first eukaryote" Nature 392, 37-41.

2. Cette cellule eucaryote hétérotrophe absorbe à son tour une cyanobactérie, organisme photosynthétique contenant un plaste : la cyanobactérie devient un chloroplaste. Il en résulte une cellule eucaryote autotrophe. La membrane interne du chloroplaste est d'origine cyanobactérienne et la membrane externe a pour origine la membrane plasmique de la cellule qui l'a absorbé.

  • La respiration au sulfate a précédé la respiration à l'oxygène.
  • La respiration à l'oxygène est apparue obligatoirement après la photosynthèse évoluée qui décompose l'eau et enrichit l'atmosphère en oxygène.

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b. L'endosymbiose secondaire

Une cellule eucaryote hétérotrophe absorbe une cellule eucaryote autotrophe contenant des chloroplastes : ceux-ci sont alors entourés de quatre membranes (2 membranes du chloroplaste + 1 membrane plasmique + 1 membrane de phagocytose).

c. L'endosymbiose secondaire : cas de certaines algues

Une cellule eucaryote hétérotrophe absorbe une cellule de Rhodophyta (algues rouges) ou une cellule de Chlorophyta (algues vertes). Cette endosymbiose secondaire débouche sur 2 nouveaux groupes d'algues : les Cryptophytes et les Chlorarachniophytes.

Ces organismes contiennent des mitochondries et des plastes mais aussi un organite appelé le nucléomorphe, réminiscence du noyau de l'algue. Exemple : Guillardia theta.

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Source : Gould (2012)

La comparaison des génomes, notamment des algues, est un point capital pour conforter la théorie endosymbiotique.

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3. Arguments supplémentaires pour une origine bactérienne du chloroplaste

Une bactérie photosynthétique telle qu'une Cyanobactérie et un chloroplaste d'une cellule eucaryote ont des points communs :

  • l'ADN du chloroplaste est circulaire et il n'est pas associé à des histones comme dans le cas des bactéries
  • une partie de la synthèse des protéines du chloroplaste a lieu dans le chloroplaste avec des ribosomes qui ressemblent aux ribosomes des bactéries
  • tout plaste provient d'un plaste pré-existant
  • la division des chloroplastes s'effectue à un rythme indépendant de la division du noyau
  • chez les plantes supérieures, les deux membranes de l'enveloppe du chloroplaste sont différentes : la membrane interne ainsi que les membranes des thylacoïdes ont des points communs avec les membranes bactériennes

Caractéristiques des génomes chloroplastiques

Les chloroplastes possèdent plusieurs copies d'un génome circulaire mesurant de 120 à 217 kb (150 kb en moyenne) chez les plantes supérieures. Le génome des chloroplastes contient en moyenne une centaine de gènes.

Voir la carte interactive du génome de chloroplaste.

Le séquençage complet de l'ADN chloroplastique de plusieurs plantes très éloignées au sens évolutif (algues, bryophytes, gymnospermes, angiospermes) a révélé que chez les plantes terrestres, l'organisation de ce génome circulaire est remarquablement conservée.

Hormis pour certaines légumineuses et des conifères, le génome chloroplastique est caractérisé par la duplication d'une région contenant l'ADN ribosomique chloroplastique.

Les gènes de l'ADN chloroplastique se répartissent en deux catégories :

  • l'une contient :
    1. tous les ARN nécessaires à la transcription des gènes (30 - 31 ARN de transfert et 4 ARN ribosomiques)
    2. 21 protéines ribosomiques
    3. 4 sous-unités de l'ARN polymérase
  • l'autre contient :
    1. 29 gènes codant des protéines impliquées dans la photosynthèse
    2. 11 gènes impliqués dans la photorespiration
    3. en particulier, le gène rbcL qui code pour la grande sous-unité de la ribulose biphosphate carboxylase (RuBisCO), l'enzyme clé de la photosynthèse. La RuBisCO est constituée de sous-unités codées par le génome chloroplastique et par le génome nucléaire, ce qui démontre l'étroite collaboration entre les deux génomes.

L'ADN chloroplastique a un taux d'évolution assez lent. Ainsi, le séquençage de parties de l'ADN chloroplastique (comme le gène rbcL) permet de retracer l'évolution des grandes familles de plantes via des reconstructions phylogénétiques.

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4. Arguments supplémentaires pour une origine bactérienne de la mitochondrie

Le protéome mitochondrial "moderne" de l'homme semble un "vestige" du génome protéo-bactérien. Il contient 37 gènes qui codent pour 13 protéines, 22 ARN de transfert et 2 ARN ribosomiques.

Remarque : 1100 autres protéines mitochondriales sont codées par l'ADN génomique.

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Source : Vafai & Mootha (2012)

La similarité des séquences des protéines de la mitochondrie avec celles de l'organisme vivant le plus proche des espèces ancestrales protéo-bactériennes, Rickettsia prowazekii, a été étudiée (bioinformatique). Cela a permis de déterminer que environ 800 des protéines mitochondriales codées par l'ADN génomique ont une origine protéo-bactérienne.

Un point très important est qu'environ 300 protéines mitochondriales codées par l'ADN génomique n'ont aucun homologue chez les organismes procaryotes : on peut considérer ces protéines comme des innovations des eucaryotes.

Les ribosomes mitochondriaux ressemblent à ceux de certaines bactéries et l'ADN polymérase mitochondriale ressemble à celle du bactériophage.

La ribonucléotide réductase (synthèse des désoxy-ribonucléotides) n'est trouvée que dans le cytosol, mais la déficience de cette enzyme est la cause du syndrome de déplétion de l'ADN mitochondrial.

Caractéristiques des génomes mitochondriaux des plantes

  • Ils se distinguent de ceux des autres eucaryotes.
  • Leur taille est plus importante et beaucoup plus variable : de 200 kb chez les brassicacées à 2500 kb chez les cucurbitacées, contre 16 à 20 kb chez les mammifères.
  • La caractéristique de ces génomes est la présence de séquences répétées (impliquées dans des recombinaisons entre molécules d'ADN mitochondrial) variables en taille, en nombre de répétition et en orientation.
  • Cependant, malgré leur grande variabilité en taille, les génomes mitochondriaux des plantes semblent avoir le même contenu en information génétique : de 100 à 120 gènes (inclus ceux qui codent pour les ARN de transfert et les ARN ribosomiques).

Il existe un processus propre aux mitochondries végétales : l'édition des messagers. Le transcrit primaire peut subir des modifications post-transcriptionnelles qui changent spécifiquement certaines cytidines en uraciles. Les codons de l'ARN messager sont donc modifiés.

Voir le cours sur le séquençage des génomes.

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5. Evolution des organismes via la phylogènie du cytochrome C

Visualisation du cytochrome C de Thunnus alalunga à une résolution de 1,5 Å. PDB : 5CYT

Motif de fixation de l'hème (protoporphirine IX à Fe) : CXXCH

Le cytochrome c est une protéine de la chaîne respiratoire.

Le cytochrome c existe depuis pratiquement le début de la vie sur terre et on le trouve dans la plupart des êtres vivants, (plantes, animaux, levures, bactéries).

On connait un trés grand nombre de séquences du cytochrome C et d'autres cytochromes (a, a3, b, b5, b6, c1, d, f, P450, ...).

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C’est donc une protéine qui se prête à des études de phylogènie. Les reconstructions d'arbres phylogénétiques par des moyens bioinformatiques, permettent de retracer l'historique de l’évolution des espèces et d'étayer la théorie endosymbiotique.

La comparaison des génomes, notamment des algues, est un point capital pour conforter la théorie endosymbiotique.

Figure ci-dessous : arbre, construit sur la base des séquences du cytochrome c, retraçant l'évolution des métabolismes bactériens et notamment l'apparition de la respiration bien après la photosynthèse.

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Source : "Physiologie végétale" (1995) - D. Laval-Martin et P. Mazliak

  • la fermentation : hétérotrophie primitive des bactéries fermentaires (premiers êtres vivants)
  • la chimiosynthèse primitive : 2 premiers milliards d'années de la terre
  • la photosynthèse bactérienne primitive : bactériochlorophylle
  • la photosynthèse évoluée des cyanobactéries, algues vertes, plantes vasculaires : présence des 2 photosystèmes PS I et PS II et circulation non cyclique des électrons de l'eau au [NADPH + H+]
  • la chimiosynthèses évoluées: bactéries chimiosynthétiques possédant les enzymes du cycle de Calvin
  • la respiration au sulfate a précédé la respiration à l'oxygène, apparue obligatoirement après la photosynthèse évoluée décomposant l'eau et enrichissant l'atmosphère en oxygène.
  • enfin la respiration à l'oxygène (hétérotrophie évoluée) : utilisation de l'oxygène et synthèse d'ATP via la phosphorylation oxydative.

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Figure ci-dessous : photo - organotrophie de la bactérie pourpre non sulfureuse Rhodospirillum rubrum.

photo organotrophie bacterie pourpre non sulfureuse Rhodospirillum rubrum Endosymbiose endosymbiotic endocytose procaryote eucaryote cyanobacterie cyanobacteria chloroplast photosynthese photosynthesis oxygen respiration cytochrome mitochondrie mitochondria gene transfert evolution phylogenie phylogeny biochimej

Source : "Physiologie végétale" (1995) - D. Laval-Martin et P. Mazliak

C'est un photosystème à bactériochlorophylle qui opère une circulation cyclique des électrons délocalisés par les photons captés.

  • Deux évolutions importantes sont annoncées : l'ATP et le NAD réduit peuvent être utilisées pour réduire le CO2 de l'air. Il s'agit donc du passage de la semi - autotrophie à l'autotrophie complète pour le carbone et l'énergie.
  • Quand l'oxygène aura envahi l'atmosphère, les cytochromes c injecteront leurs électrons soit vers la bactériochlorophylle, soit vers d'autres cytochromes (a1, a3) et l'oxygène.
  • La respiration apparaîtra comme "sous-produit" de la photosynthèse primitive.

Voir le transport non cyclique et cyclique des électrons des végétaux modernes.

 

6. Liens Internet et références bibliographiques

"Biologie : Licence - tout le cours en fiche" Giraud et al. (2010) - DUNOD - ISBN : 978-2-10-053449-4

J.-C. Callen - "Biologie Cellulaire" (1999), Ed. DUNOD - ISBN : 2 10 003197 X

"Physiologie végétale" (1995) volume I - "Nutrition et métabolisme", Danielle Laval-Martin et Paul Mazliak, Collection "Méthodes", Hermann / ISBN : 2 7056 6253 7

"La théorie endosymbiotique" - (Equipe multimédia - Université Jussieu)

"LEA Database"

Aller au site

LEAPdb

Taylor F.J.R. (1976) "Autogenous theories for the origin of eukaryotes" Taxon 25, 377 - 390

Wegener Parfrey et al. (2011) "Estimating the timing of early eukaryotic diversification with multigene molecular clocks" Proc. Natl. Acad. Sci. U S A. 16, 13624 - 13629

Article

Article

Vafai & Mootha (2012) "Mitochondrial disorders as windows into an ancient organelle" Nature 491, 374 - 383

Curtis et al. (2012) "Algal genomes reveal evolutionary mosaicism and the fate of nucleomorphs" Nature

Gould (2012) "Evolutionary genomics: Algae's complex origins" Nature 492, 46 - 48

Article

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